MO.CO.Panacée

14 rue de l'École de Pharmacie, Montpellier

Du 20 mai au 27 août 2017

Vernissage le 19 mai

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Jacques Charlier

Une rétrospective

 

Première rétrospective en France de l’artiste belge Jacques Charlier, pionnier de l’art conceptuel européen auquel il a intégré l’humour et la bande dessinée, mais également la vie professionnelle et le rock - il a sorti plusieurs albums post-punk à la fin des années 1970.

Partant d’une sociologie critique du monde de l’art, Jacques Charlier a évolué vers un art complexe et inclassable, qui évoque l’esprit de Francis Picabia tout en anticipant sur l’art américain des années 1990 et notamment Mike Kelley. Son oeuvre porte un éclairage décisif sur les rapports entre l’Europe et les États-Unis dans les années 1960, avant de se prolonger dans une totale excentricité par rapport à l’art de son temps.

Les séries Paysages professionnels (1963-1970), Zone absolue (1969-1970), Photographies de vernissages (1974-1976) et Photo sketches (1974-1977) seront notamment présentées lors de cette exposition au MO.CO. Panacée.

 

Dans la banlieue du sublime, l’art de Jacques Charlier

"Chaque artiste, depuis le contexte spécifique dans lequel il/elle se trouve, s’efforce de répondre aux questions qu’à ses yeux son époque lui pose, et ce choix varie selon sa personnalité et son héritage culturel. Jacques Charlier a commencé son oeuvre à un moment historique, le début des années 1960, où le corpus constitué de l’art moderne, avec ses héros et ses chefs d’oeuvre, ses maudits et déjà ses oubliés, semblait immuable. De ce corpus découlait d’ailleurs un autre, en train de se former et qui le prolongeait comme naturellement, celui de l’avant-garde. Captivé par ce récit, placé à ses débuts devant ce flux où il suffisait de plonger, Charlier a d’emblée considéré sa pratique artistique comme une apostille au récit héroïque des avant-gardes, comme un exercice du commentaire, mais aussi comme une position à prendre, une attitude, dont les oeuvres physiques ne seraient que les traces ou les bornes. Liégeois, il va refléter ce mythe depuis sa localité, et s’ancrer dans cette réalité « provinciale » en l’élevant vers la légende, tel le comté sudiste de William Faulkner. Et c’est depuis Liège qu’il a tenté de répondre à la grande question qu’à ses yeux son époque lui posait, celle des rapports complexes existant entre l’art et la vie, l’oeuvre et les activités humaines. Hannah Arendt, dans ce qu’elle nommait la « via activa », distinguait le travail, l’oeuvre et l’action. La première singularité de Jacques Charlier réside dans le fait qu’il n’a eu de cesse de combiner ces trois catégories, et de les mêler dans une oeuvre qui embrasse d’un seul mouvement et le labeur professionnel, et la créativité individuelle, et l’engagement social. Cette intrication originale est donnée dès 1964 avec les Paysages professionnels,

en un geste radical de sublimation de son emploi d’alors, au service technique de la Ville de Liège. Le coup de génie de Charlier fut d’entrevoir que la production quotidienne de ce service, à savoir des photographies documentant des problèmes de voirie, pouvait être mise en relation avec l’actualité esthétique d’alors : déplaçant l’art vers l’espace du travail salarié, il créa ainsi une position inédite, inventant la notion de prolétariat artistique, tout en donnant droit de cité au « document photographique» dans l’art. Il s’agissait tout d’abord, pour lui, de « mettre en confrontation, et même en contradiction, les documents professionnels avec toute la parade esthétique ». Premier oxymore, et tension initiale : toute l’oeuvre ultérieure se composera de mises en tension soigneusement orchestrées, et son mouvement dominant sera celui d’un écart maximum par rapport à tout style. L’originalité traverse les manières de faire et de voir."

Extrait du texte de Nicolas Bourriaud, Jacques Charlier, un art sans identité. Catalogue de l’exposition.

 

En écho à Montpellier

Les oeuvres récentes de Jacques Charlier seront présentées à la galerie Aperto à Montpellier du 15 octobre au 4 novembre 2017.

Dans ses cycles de peintures, Jacques Charlier joue avec les références savantes ou populaires et multiplie les allusions à l’art moderne. Il associe à un répertoire issu de l’histoire de l’art (signes iconiques aujourd’hui partagés par le plus grand nombre) tout un tas de représentations vernaculaires anciennes ou contemporaines, qui ont pour vertu de décaler la lecture du tableau avec humour et désinvolture.