Abbaye de Fontfroide
Route départementale 613, 11100 Narbonne

Du 18 septembre au 30 novembre 2025
Vernissage mardi 14 octobre à 15h
Un partenariat Abbaye de Fontfroide & MO.CO. Montpellier Contemporain

(je désire suggérer qu’ici et ailleurs tout se tient), Sofia Lautrec

Dans le cadre de sa résidence de recherche et de création à l’Abbaye de Fontfroide, en partenariat avec MO.CO. Montpellier Contemporain, Sofia Lautrec explore les pierres du monument comme des archives sensibles et résonnantes. Celles qui fondent les murs, ornent les chapiteaux ou jalonnent les jardins deviennent les supports d’une enquête géologique, historique et poétique, où s’enchevêtrent mémoire matérielle, écriture et transmission. En travaillant le verre, le plomb, les sédiments ou encore les minéraux, l’artiste interroge la capacité de la matière à enregistrer et restituer des récits, à l’image des « écritures minérales » évoquées par Roger Caillois1. Son intervention s’inscrit dans l’histoire stratifiée de l’Abbaye (entre héritage cistercien et geste moderniste), et convoque en creux la figure de Gustave Fayet2, dont la vision transdisciplinaire continue d’habiter les lieux. À travers un parcours d’installations sculpturales et photographies, Sofia Lautrec donne forme à une écriture rocheuse, où le langage s’ancre dans la matière.

Le titre de l’exposition « (je désire suggérer qu’ici et ailleurs tout se tient) » est extrait des Récurrences dérobées de Roger Caillois et fait émerger l’idée que l’ici contient déjà l’ailleurs. Il renvoie aux expériences du physicien Chladni à la fin du XVIIIᵉ siècle, dont les recherches acoustiques révélèrent dans la poussière minérale des figures singulières — comme si la matière pouvait vibrer jusqu’à dévoiler son origine cosmique. En écho à cette approche scientifique et poétique du monde, Sofia Lautrec développe une langue transmutée, où le mot devient verre, le souffle devient forme, et le poème s’incarne dans le minéral. Ses installations activent une topographie sensible, où chaque geste, chaque tension entre le dense et l’évanescent participe d’un récit contemporain. À Fontfroide, là où les pierres gardent la mémoire du temps, l’artiste prolonge une réflexion sur la manière dont la création peut révéler, par la matière, des géographies secrètes et des récits partagés, entre visible et invisible.

Cette exposition fait suite à une résidence de recherche et création à l’Abbaye de Fontfroide, organisée durant le printemps et l’été 2025, en partenariat avec MO.CO. Montpellier Contemporain, dans le cadre de son programme « Artistes Demain ».

La résidence de Sofia Lautrec à l’Abbaye de Fontfroide s’est effectuée en résonnance avec « Horizons » celle réalisée en parallèle aux Maisons Daura à Saint-Circq-Lapopie en partenariat avec la Maison des Arts Claude et Georges Pompidou, Cajarc.

 

1 Roger Caillois (1913-1978) est un écrivain, sociologue et critique littéraire français, traducteur de Borges. Son œuvre, qui doit beaucoup à l'exploration des mondes poétiques de l'imaginaire et du fantastique, constitue un apport essentiel et parfaitement original à la critique littéraire et aux sciences humaines du XXe siècle. Fasciné par l'univers minéral, il consacra également plusieurs ouvrages aux pierres et à la gemmologie.

2 En 1908, Gustave et Madeleine Fayet achètent l’abbaye aux enchères. Artiste et conservateur de Musée, Gustave Fayet est surtout connu pour son talent de collectionneur visionnaire et ses commandes d’œuvres symbolistes : Gauguin, Van Gogh, Cézanne, et surtout Odilon Redon.

 

Née en 1997 à Montpellier, Sofia Lautrec vit et travaille à Paris. Après des études de cinéma, elle poursuit sa formation aux MO.CO. Esba - École supérieure des beaux-arts de Montpellier tout en obtenant une licence de Lettres Modernes. Sa pratique artistique, à la croisée de l’écriture, de la sculpture et de la poésie, explore la matérialité du langage et sa transposition en formes sensibles. Verre, plomb ou terre deviennent supports d’une recherche alchimique où le mot se fait matière, entre éruption volcanique et souffle poétique. Elle compose ainsi un univers à la fois tactile et narratif, où chaque œuvre interroge les liens entre corps, langage et éléments.